Un simple moment d’inattention peut parfois coûter cher, très cher. Au Portugal, un berger vient d’en faire l’amère expérience : en laissant trois de ses moutons divaguer sur une route nationale, il a été tenu responsable d’un accident de la route. Le verdict judiciaire, tombé plusieurs années après les faits, illustre la rigueur du droit en matière de responsabilité civile en cas de dommages causés par des animaux.
Un accident aux conséquences judiciaires lourdes
Les faits remontent au 12 octobre 2019, peu après 21h. Sur une route nationale de la ville de Torre de Moncorvo, un automobiliste percute de plein fouet trois moutons se trouvant en plein milieu de la chaussée. L’impact est brutal, les animaux sont tués, et le véhicule, sévèrement endommagé.
Le tribunal portugais, saisi de l’affaire, a tranché sans ambiguïté : le berger, propriétaire des moutons, est reconnu responsable de l’accident. Une présomption de culpabilité a été retenue à son encontre, au motif que les animaux n’étaient pas accompagnés, ni surveillés au moment de l’incident. En droit portugais, comme dans d’autres systèmes juridiques européens, le gardien d’un animal est présumé responsable des dommages que ce dernier peut causer, sauf preuve contraire.
Dans ce cas précis, aucune faute de conduite n’a été reprochée à l’automobiliste. Le tribunal a estimé que le conducteur n’avait pu éviter l’impact compte tenu des circonstances, exonérant ainsi toute responsabilité de sa part.
Une addition salée pour le propriétaire
Au total, le berger devra s’acquitter de 9 600 euros pour couvrir les frais engendrés par l’accident. Cette somme inclut notamment :
- Les réparations du véhicule, estimées à plus de 9 000 euros
- Une franchise d’assurance de 350 euros
- La location d’un véhicule de remplacement, facturée 400 euros
- Le nettoyage de la chaussée, chiffré à 140 euros
Cette décision repose sur le principe selon lequel la liberté de circulation des animaux ne saurait prévaloir sur la sécurité publique. En l’absence de toute mesure de précaution – clôture, surveillance, ou autre dispositif de contrôle – le propriétaire ne peut se décharger de sa responsabilité, même de manière partielle.
Une jurisprudence qui réaffirme les obligations des éleveurs
Au-delà de l’aspect factuel, ce jugement interpelle. Il rappelle que la responsabilité des éleveurs ou détenteurs d’animaux ne s’arrête pas aux limites de leur exploitation agricole. En cas de divagation, d’intrusion sur la voie publique ou de comportement dangereux d’un animal domestique ou d’élevage, le maître en demeure juridiquement redevable des conséquences, parfois lourdes.
Ce type de contentieux, bien que peu fréquent, n’est pas anecdotique. Il renvoie à des enjeux concrets : sécurité routière, coût des dommages matériels, et encadrement juridique des activités agricoles dans des zones partagées avec des axes de circulation.
Le cas du berger portugais, s’il semble anecdotique au premier abord, met en lumière une question centrale : peut-on encore se permettre la moindre négligence quand la sécurité d’autrui est en jeu ? Dans cette affaire, trois moutons auront suffi à enclencher une mécanique judiciaire coûteuse, conclue par une sanction exemplaire.



