Une vidéo virale, relayée massivement sur TikTok, alimente l’idée qu’un simple geste de solidarité pourrait bientôt devenir une infraction. Mais que dit réellement la loi ? Faut-il craindre une nouvelle réglementation sur le prêt de véhicule ? Démêlons le vrai du faux dans ce brouhaha numérique où l’anxiété s’invite à chaque tournant.
Une rumeur virale, une affirmation alarmiste
C’est une vidéo au ton péremptoire, visionnée près de deux millions de fois, qui a mis le feu aux poudres : à partir du 1er septembre 2025, prêter son véhicule sans déclaration préalable pourrait coûter jusqu’à 750 euros d’amende. En cause, un supposé nouvel article 324.2 du Code de la route interdisant le prêt non déclaré d’un véhicule, même à un proche. La mesure aurait pour objectif de lutter contre les fraudes aux radars, en forçant les propriétaires à désigner les conducteurs réels des infractions.
La vidéo précise que toute mise à disposition temporaire d’un véhicule devrait faire l’objet d’une déclaration sur le site de l’ANTS, information ensuite transmise au ministère de l’Intérieur et à la DGFiP. Un dispositif jugé dissuasif, notamment pour éviter les pratiques de « non-désignation » lors des excès de vitesse. L’intention prêtée à cette disposition : renforcer la traçabilité des conducteurs.
Aucune base légale : une intox bien ficelée
Mais l’alerte est infondée. Aucun texte législatif ou réglementaire en ce sens n’a été adopté, ni même envisagé. Cette rumeur repose sur une interprétation erronée du cadre existant. Comme le confirme le ministère de l’Intérieur, il n’existe aucun projet de loi visant à interdire ou encadrer par une amende le prêt occasionnel d’un véhicule entre particuliers.
Jean-Baptiste Le Dall, avocat spécialisé en droit routier, dément formellement l’existence de cette disposition. Il précise : « Cette vidéo est tout simplement fausse. » Elle exploite un climat d’inquiétude autour de la surveillance numérique et de la responsabilisation des conducteurs pour véhiculer un message anxiogène… sans aucun fondement juridique.
Ce que dit réellement le droit
Prêter son véhicule reste parfaitement légal. En revanche, cela n’est pas sans conséquences. D’un point de vue assurantiel, tout dépend des termes du contrat souscrit. Certaines compagnies peuvent imposer une franchise plus élevée en cas de sinistre si le conducteur n’est pas déclaré comme utilisateur autorisé. D’où l’intérêt de bien relire les conditions générales de son contrat.
En matière d’infractions routières, le propriétaire du véhicule est en principe redevable de l’amende, sauf s’il désigne un autre conducteur. En cas de non-désignation, il conserve ses points mais s’acquitte du montant de la contravention. Aucune peine complémentaire ne peut s’appliquer sans base légale précise.
Prudence face aux raccourcis numériques
Cet épisode rappelle la puissance de diffusion des fausses informations, en particulier lorsque celles-ci se présentent sous une forme crédible et avec un ton autoritaire. En l’occurrence, une vidéo bien montée, un vocabulaire juridique approximatif mais efficace, et un contexte anxiogène font recette.
Il est essentiel, face à ce type de contenus viraux, de vérifier systématiquement l’information auprès de sources fiables, et de garder à l’esprit que le droit ne se décrète pas en vidéo, encore moins en 30 secondes.
Non, prêter sa voiture à un proche ne vous coûtera pas 750 euros le 1er septembre. Mais oui, cela engage toujours votre responsabilité. Et c’est bien là que réside l’essentiel du débat : dans la nuance, et non dans le sensationnel.



