BRUXELLES — L’UE envisage de permettre à son industrie lourde de polluer plus longtemps dans le cadre d’un nouveau projet de proposition visant à sortir de l’impasse sur l’objectif 2040 du bloc de réduction des émissions liées au réchauffement de la planète.
Sous la pression de parvenir à un accord avant le sommet climatique COP30 qui débute le 10 novembre au Brésil, le Danemark, qui dirige les négociations entre les pays de l’UE, ouvre la porte à un ralentissement des efforts climatiques de l’UE. L’objectif est d’obtenir le soutien de la majorité des pays en faveur de l’objectif d’une réduction des émissions de 90 % d’ici 2040 par rapport aux niveaux de 1990.
Le texte, obtenu par L’Observatoire de l’Europe, propose que l’UE évalue tous les deux ans les progrès accomplis vers la réalisation du nouvel objectif climatique de 2040, en tenant compte « des preuves scientifiques, des avancées technologiques et de l’évolution des défis et des opportunités pour la compétitivité mondiale de l’UE ». La Commission européenne pourrait alors suggérer des modifications législatives, ajoute le document, ce qui signifierait que Bruxelles pourrait ajuster – et potentiellement affaiblir – son objectif à l’avenir.
Cette suggestion intervient après que les dirigeants européens ont discuté de la compétitivité et de la politique climatique lors d’un sommet la semaine dernière et ont présenté des idées pour sortir les négociations de l’impasse. Un certain nombre de dirigeants ont appelé l’UE à fixer des objectifs climatiques pragmatiques et à introduire davantage de flexibilités pour les atteindre, ce qui se reflète désormais dans le nouveau document de compromis.
Mais permettre à l’UE de ralentir ses efforts en faveur du climat pourrait lui faire rater l’objectif de 2040 ou la forcer à s’appuyer sur d’autres instruments pour l’atteindre, comme l’externalisation de davantage de réductions d’émissions vers les pays les plus pauvres.
La présidence danoise propose d’introduire des mesures pour éviter de pénaliser un secteur (comme les industries très polluantes) si d’autres secteurs (par exemple la foresterie, qui contribue à séquestrer le carbone dans les forêts) ne peuvent pas atteindre leurs objectifs de réduction ou d’absorption des émissions.
La proposition précise que « les éventuels déficits dans un secteur ne se feront pas au détriment des autres secteurs économiques, notamment les secteurs industriels relevant de l’UE (système d’échange de quotas d’émission) ».
Le document ne propose pas de modifier l’objectif global de réduction des émissions de 90 pour cent comme proposé par la Commission en juillet. Mais cela soulève la possibilité de modifier la mesure dans laquelle les compensations internationales de carbone – un instrument qui permet à l’UE d’externaliser les réductions d’émissions à l’étranger – devraient contribuer à atteindre l’objectif.
La Commission a proposé de plafonner leur utilisation à 3 pour cent à partir de 2036, mais les pays membres, dont la France et la Pologne, ont suggéré 5 ou 10 pour cent. Cela devrait être un sujet clé des négociations cette semaine et la semaine prochaine, selon un diplomate européen.
Le document indique également que les objectifs climatiques du bloc ne doivent pas être poursuivis au détriment des priorités militaires de l’UE.
Lors de l’élaboration d’une nouvelle législation climatique, la Commission devrait prendre en compte « la nécessité de garantir la capacité de l’Union et de ses États membres à accroître et à renforcer rapidement leur capacité défensive en s’attaquant aux éventuels fardeaux tout en maintenant les incitations à la décarbonation industrielle », indique le document.
Le texte de compromis sera maintenant discuté par les envoyés nationaux de l’UE mercredi et vendredi dans le but de permettre aux ministres de l’Environnement de parvenir à un accord le 4 novembre.



