FILE - Sunday, Aug. 9, 2015 file photo, Selahattin Demirtas, then leader of the pro Kurdish Democratic Party of Peoples (HDP)

Jean Delaunay

La Turquie condamne des hommes politiques pro-kurdes à de longues peines de prison pour les émeutes meurtrières de 2014

Plus de 100 personnes ont été jugées pour un incident notoire qui a fait 37 morts.

Un tribunal turc a condamné jeudi des dizaines d’hommes politiques pro-kurdes à entre neuf et 30 ans de prison pour des émeutes meurtrières en 2014. Les Kurdes étaient irrités par ce qu’ils percevaient comme une inaction du gouvernement contre le soi-disant État islamique, ou EI.

L’incident s’est produit lors du siège par l’EI de la ville frontalière syrienne de Kobanî.

Les trois jours d’affrontements qui ont éclaté en octobre 2014 ont fait 37 morts et des centaines de blessés, parmi lesquels des policiers et des civils.

Les manifestations ont été organisées par les dirigeants du Parti démocratique du peuple pro-kurde, ou HDP, frustré par ce qu’ils considèrent comme un soutien des autorités turques aux militants de l’EI.

Au total, 108 personnes ont été jugées pour divers crimes, notamment le meurtre des 37 victimes et des crimes contre l’intégrité de l’État.

Parmi les accusés figuraient les anciens dirigeants du HDP emprisonnés, Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag, accusés d’avoir organisé les manifestations et d’avoir incité à la violence.

Les critiques ont décrié le procès comme étant politiquement motivé et faisant partie d’une répression plus large du gouvernement contre ses opposants pro-kurdes.

Le tribunal d’Ankara a condamné Yuksekdag pour atteinte à l’unité de l’État, incitation à des actes criminels et participation à des actes de violence. Elle a été condamnée à 30 ans de prison, a rapporté la chaîne de télévision publique TRT.

Les partisans du Parti pour l'égalité des peuples et la démocratie (DEM), pro-kurde, scandent des slogans lors des célébrations du Newroz à Istanbul.
Les partisans du Parti pour l’égalité des peuples et la démocratie (DEM), pro-kurde, scandent des slogans lors des célébrations du Newroz à Istanbul.

Demirtas, qui s’est présenté à deux reprises à la présidence, a été condamné au total à 28 ans et six mois de prison.

Les hommes politiques devraient faire appel des verdicts.

Au moins dix autres accusés ont été acquittés des accusations portées contre eux.

L’audience s’est déroulée dans une atmosphère tendue, les avocats frappant sur leurs bureaux et quittant la salle d’audience pour protester contre les verdicts, a rapporté le journal Cumhuriyet.

La répression

Le gouvernement a accusé le HDP d’avoir des liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan, ou PKK, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, les États-Unis et l’Union européenne. Le groupe mène une insurrection armée contre l’État turc depuis 1984 et le conflit a tué des dizaines de milliers de personnes.

Les responsables gouvernementaux ont accusé les dirigeants du HDP d’avoir suivi les instructions du PKK pour organiser les émeutes.

Le gouvernement a fréquemment réprimé le mouvement politique pro-kurde, en privant les législateurs de leurs sièges parlementaires et en démettant les maires élus de leurs fonctions.

Plusieurs députés du HDP ont été emprisonnés aux côtés de Demirtas et de Yuksekdag pour des accusations liées au terrorisme.

Le parti a depuis changé son nom pour devenir Parti de l’égalité du peuple et de la démocratie, ou DEM, et constitue le troisième plus grand groupe au Parlement turc.

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