Demonstrators protest against the amnesty law outside the European Parliament in 2023 in Strasbourg

Jean Delaunay

Politique de l’UE. Pourquoi la question catalane affecte-t-elle la campagne électorale européenne en Espagne ?

Les récentes élections en Catalogne ont préparé la scène politique espagnole en vue des prochaines élections européennes. Les discussions sur le futur gouvernement régional influenceront la campagne pour les sièges à Bruxelles. Le Superpoll d’L’Observatoire de l’Europe suggère que le centre-droit a un avantage, suivi par les socialistes.

Malgré leur dimension locale, les élections catalanes ont traditionnellement un impact significatif sur l’ensemble de la scène politique espagnole, même lorsqu’il s’agit des élections européennes.

Selon la scène politique et l’opinion publique espagnoles, il est fort probable que les négociations ardues en cours entre les forces politiques de Barcelone pour former un gouvernement local influenceront la campagne pour les élections européennes du 9 juin.

Les négociations éreintantes viennent de commencer. Les socialistes catalans, PSC (membre S&D à Strasbourg), ont gagné, mais ils n’ont pas obtenu suffisamment de sièges pour diriger la Catalogne.

Les forces séparatistes ont perdu leur élan. Pourtant, le parti qui a subi la plus forte fuite de voix parmi les forces indépendantistes est l’ERC (la Gauche républicaine de Catalogne, affiliée aux Verts au Parlement européen), dirigé par le Père Aragonès.

La Gauche républicaine de Catalogne soutient le gouvernement central dirigé par le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez et a temporairement mis de côté l’intention initiale de faire sécession en adoptant une approche de négociation avec le gouvernement de Madrid.

En échange, l’exécutif de centre-gauche et de gauche a accordé l’amnistie à certains des dirigeants sécessionnistes qui ont organisé le référendum séparatiste en 2017.

Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, à gauche, s'entretient avec le président catalan Pere Aragones lors d'une réunion à Barcelone, Espagne, le jeudi 21 décembre 2023.
Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, à gauche, s’entretient avec le président catalan Pere Aragones lors d’une réunion à Barcelone, Espagne, le jeudi 21 décembre 2023.

La question catalane polarise gravement l’ensemble de la scène politique et de la société espagnole depuis le référendum organisé malgré l’interdiction du gouvernement central de l’époque.

La plupart des loyalistes espagnols et catalans opposés à l’amnistie ont voté pour le centre-droit et la droite.

Le Parti populaire (PP) et Vox, deux partis nationalistes loyalistes, ont également connu un succès relatif en Catalogne. Le PP est membre du PPE de centre-droit (Parti populaire européen) et Vox fait partie du parti national-conservateur ECR (Conservateurs et réformistes européens).

Les hauts et les bas de la popularité de Pedro Sánchez sont également liés à la question catalane.

La position résolue des conservateurs modérés et des forces politiques de droite contre l’amnistie proposée par le gouvernement socialiste pour les organisateurs du référendum séparatiste a accru leur popularité.

L’amnistie n’a pas encore été mise en œuvre, mais elle offrirait la possibilité au leader séparatiste catalan Carles Puigdemont de retourner en Espagne.

L’Espagne a réussi à atténuer la crise catalane, notamment grâce au rejet clair de l’option séparatiste par les institutions de l’Union européenne et les États membres.

D’autres facteurs polarisants en Espagne qui ont influencé le vote européen sont le mécontentement des agriculteurs, les questions de genre et LGBTQ+, ainsi que les sentiments anti-migration croissants – tous importants pour les débats à Bruxelles.

Quels sont les favoris des partis espagnols ?

Les élections européennes s’annoncent cruciales pour les forces politiques espagnoles et pour leur avenir.

Selon le Centre de sondages L’Observatoire de l’Europe, le PP (Parti des peuples) arrive en tête des intentions de vote aux élections européennes, même s’il semble ralentir légèrement, en perdant 0,3% par rapport à mars 2024 dernier.

L’eurodéputée catalane Dolors Montserrat est la favorite du PP aux élections européennes. Elle a été ministre de la Santé dans le gouvernement conservateur (PP-PPE) de Mariano Rajoy lorsque la Catalogne a organisé le référendum séparatiste en 2017.

Le parti national-conservateur Vox a choisi un homme politique catalan en tête de son scrutin : Jorge Buxadé, ancien membre de la Phalange espagnole-Jons_, un héritage de l’époque de Francisco Franco.

Le choix du conservateur modéré de présenter un candidat catalan fait partie d’une démarche opérationnelle visant à rassembler le plus de voix possible en Catalogne, qui a un poids démographique et électoral tout à fait important.

Il s’agit également d’une stratégie visant à défier politiquement la région autonome qui est un bastion traditionnel des partis nationalistes régionaux, socialistes et de gauche.

Le PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol) de Pedro Sánchez a choisi une personnalité politique de premier plan comme tête de liste pour le vote européen : Teresa Ribera, l’actuelle ministre de la transition verte. Elle devrait devenir la représentante espagnole au sein de la future Commission européenne.

La ministre espagnole de la Transition écologique, Teresa Ribera, assiste à une conférence de presse lors du Sommet des Nations Unies sur le climat COP28, 2023.
La ministre espagnole de la Transition écologique, Teresa Ribera, assiste à une conférence de presse lors du Sommet des Nations Unies sur le climat COP28, 2023.

Les votes des nationalistes locaux catalans répartiront leurs sièges entre différents groupes au Parlement européen. Les quelques députés d’Esquerra Republicana de Catalunya seront membres du groupe des Verts, aux côtés d’autres forces nationalistes locales espagnoles.

Juntesle parti séparatiste toujours vivant et dynamique de Carles Puigdemont, fait partie du groupe des non-inscrits.

Si Puigdemont revenait en Espagne après son exil autoproclamé, il pourrait influencer les intentions de vote de la région.

« Cependant, le décret d’amnistie doit encore être signé par Pedro Sanchez. Et il a de nombreuses implications politiques qui vont bien au-delà des négociations catalanes en cours et des élections européennes de juin prochain », estime l’analyste conservateur Juan A Soto de Fortius Consulting.

Quant à la gauche, Sumar a perdu du terrain depuis mars, suggère le SuperPoll. Ils sont à 9% des intentions de vote. Sa leader, Yolanda Díaz, a donné aux cinq ou six députés européens potentiels de Sumar la liberté de choisir le groupe qu’ils rejoindraient entre les Verts et la Gauche européenne.

Cependant, la situation politique en Espagne reste extrêmement fluide et les opinions électorales pourraient connaître des changements rapides dans les semaines à venir.

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