The European Parliament plenary in Strasbourg

Milos Schmidt

L’équipe future de Von der Leyen et le discours d’Orbán : l’incertitude règne alors que les députés siègent à Strasbourg

Ursula von der Leyen a été convoquée pour dévoiler son projet de « collège » de commissaires et Orbán devrait être accueilli avec enthousiasme en plénière.

Une session de quatre jours du Parlement européen débute lundi, avec la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, et le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, en tête d’affiche.

Mais des points d’interrogation planent sur l’apparence des deux dirigeants, alors que la liste des nouveaux commissaires de von der Leyen risque de se défaire à la dernière minute et que des inondations majeures en Europe centrale pourraient dissuader la Première ministre hongroise de se rendre à Strasbourg.

Ursula von der Leyen a été convoquée pour dévoiler son équipe de 26 commissaires européens nommés – et les « portefeuilles » politiques qu’elle leur demandera de diriger – lors d’une réunion avec le président du Parlement et les dirigeants politiques mardi matin.

Mais lundi, Thierry Breton, le commissaire européen français qui avait été nominé pour un nouveau mandat, a brusquement démissionné de son poste et s’est retiré de la course, accusant von der Leyen d’avoir personnellement fait pression sur la France pour qu’elle retire sa candidature.

« Vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles que vous n’avez en aucun cas évoquées directement avec moi – et proposé, en guise de contrepartie politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège », peut-on lire dans la lettre de démission de Breton, partagée sur X.**

Les luttes politiques intestines en Slovénie, où l’opposition bloque l’audition de confirmation légalement requise de la candidate du gouvernement Marta Kos, risquent également de faire dérailler la formation de la prochaine Commission de von der Leyen et de piéger le puissant exécutif dans les limbes.

La Commission a jusqu’à présent insisté pour que von der Leyen soit présente à la réunion, qui a déjà été reportée une fois en raison de retards, malgré la possibilité qu’elle ne puisse pas répartir les portefeuilles à moins que la candidature de Kos ne soit approuvée.

« Il y a encore beaucoup de temps jusqu’à mardi. On dit que 24 heures, c’est long en politique et cela s’applique certainement aux procédures institutionnelles », a déclaré vendredi le porte-parole en chef de la Commission, Eric Mamer, ajoutant que l’exécutif suivait de près l’évolution de la situation en Slovénie.

« L’intention est d’aller à la Conférence des présidents mardi et de présenter le collège », a ajouté M. Mamer, même si la perspective d’une répartition des portefeuilles par von der Leyen avant que la Slovénie ne confirme ses candidats reste peu probable.

Orbán s’exprimera mercredi en plénière à Strasbourg dans le cadre de la présidence tournante de six mois de la Hongrie au Conseil de l’UE. Cette allocution intervient dans un contexte d’inquiétudes croissantes à Bruxelles concernant le projet hongrois d’accorder un accès facile aux visas aux travailleurs russes et biélorusses, une mesure qui, selon l’exécutif européen, met en danger la sécurité de l’espace Schengen sans passeport.

Les députés débattront également de l’élection présidentielle controversée de juillet au Venezuela et de la crise politique qui en découle. Les députés de droite devraient présenter une résolution – qui, si elle était approuvée, n’aurait aucune valeur juridique – reconnaissant le candidat de l’opposition Edmundo Gonzalez comme le vainqueur légitime.

Von der Leyen entre deux feux

Le rendez-vous de Von der Leyen avec les dirigeants politiques du Parlement fait partie des règles remaniées visant à permettre au Parlement de mieux surveiller la manière dont la présidente de la Commission constitue son équipe.

Cela accentue la pression sur von der Leyen pour qu’elle répartisse les portefeuilles d’une manière qui n’aliène pas les principaux partis pro-européens qui lui ont apporté leur soutien lors de sa campagne de réélection, à savoir les Libéraux, les Socialistes et les Verts.

Que l’impasse politique en Slovénie lui permette ou non de dévoiler l’ensemble de ses portefeuilles politiques et sa liste de candidats, von der Leyen risque de subir des pressions de la part des dirigeants politiques concernant les rôles de pouvoir au sein de son prochain exécutif.

Le groupe socialiste et démocrate de centre-gauche (S&D) a déjà lancé des avertissements suite à des fuites selon lesquelles les candidats issus de son propre groupe PPE se verraient confier les portefeuilles les plus influents, y compris des dossiers « sociaux » clés dans le viseur du groupe.

Le groupe a également critiqué le projet de nommer Raffaele Fitto, du parti d’extrême droite conservateur et réformiste européen (ECR), vice-président exécutif et chargé d’un mandat économique de poids. Les socialistes avaient conditionné leur soutien au second mandat de von der Leyen au maintien des garde-fous institutionnels sur Giorgia Meloni et ses alliés d’extrême droite.

Une série d’autres préoccupations pourraient être exprimées de tous les côtés du spectre politique, y compris le manque de candidates.

Le face-à-face d’Orbán

Le discours d’Orbán en plénière – prévu pour mercredi – était initialement prévu pour la session plénière de juillet mais a été reporté, en partie en raison du tollé suscité par la rencontre d’Orbán avec le président russe Vladimir Poutine.

Il n’est pas certain que les inondations qui ont frappé plusieurs régions d’Europe centrale ce week-end puissent empêcher le Premier ministre hongrois de se rendre à Budapest. Le président du PPE, Manfred Weber, a soutenu une proposition du parti d’opposition hongrois TISZA visant à retarder la venue d’Orbán en raison des inondations, qui ont touché plusieurs États membres de l’UE, dont la Hongrie.

Cette rencontre sera une rare opportunité pour les législateurs européens de confronter directement Orbán à propos d’une série de déclarations et d’actions récentes qui ont porté les tensions entre Budapest et Bruxelles à un point d’ébullition.

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban prononce un discours à l'Université d'été de Tusvanyos, à Baile Tusnad, dans le comté de Harghita, en Roumanie, le 27 juillet 2024
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban prononce un discours à l’Université d’été de Tusvanyos, à Baile Tusnad, dans le comté de Harghita, en Roumanie, le 27 juillet 2024

Mardi, les députés débattront de la décision hongroise d’ouvrir son système de visa de travail « carte nationale » aux ressortissants russes et biélorusses, ouvrant ainsi la voie à la résidence permanente.

L’exécutif européen craint que ce projet ne compromette la sécurité de l’espace Schengen sans passeport, permettant ainsi « aux espions et saboteurs russes potentiels un accès facile à l’UE », et a demandé des éclaircissements dans une lettre adressée à Budapest.

Le gouvernement hongrois a répondu à cette lettre, a déclaré un responsable de la Commission à L’Observatoire de l’Europe.

L’escalade du conflit sur la politique migratoire, qui a vu Budapest menacer de transporter par bus les migrants irréguliers de la frontière hongro-serbe jusqu’à Bruxelles, a également attisé l’exaspération du Premier ministre hongrois.

L’exécutif européen a dénoncé ces projets comme une violation flagrante du droit de l’UE, s’engageant à utiliser « tous les pouvoirs » pour garantir que Budapest respecte ses obligations légales.

Les menaces de la Hongrie sont une réponse directe à l’amende forfaitaire de 200 millions d’euros infligée en juin par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour non-respect par le pays du droit d’asile. La Cour a également demandé à Budapest de payer 1 million d’euros par jour jusqu’à ce que la Hongrie mette sa politique d’asile en conformité avec la législation européenne.

La Hongrie n’a pas encore payé les 200 millions d’euros prévus à l’échéance d’un second délai, qui expirera mardi. Orbán affirme que l’UE doit de l’argent à son gouvernement pour ne pas avoir remboursé les 2 milliards d’euros dépensés pour « protéger les frontières extérieures de l’UE ».

Vote au Venezuela

L’élection présidentielle controversée de juillet au Venezuela sera débattue mardi, et les législateurs devraient voter sur une résolution non contraignante jeudi.

Les 27 ministres des Affaires étrangères du bloc ont rejeté conjointement la demande de réélection de Nicolás Maduro, mais n’ont pas rejoint les États-Unis en reconnaissant l’opposant Edmundo González comme président élu légitime.

González a depuis demandé l’asile politique en Espagne, où le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez s’abstient de reconnaître sa victoire en raison d’un manque de preuves vérifiées, malgré l’adoption par le Congrès des députés espagnol d’une motion reconnaissant González comme vainqueur légitime.

Les mêmes divisions politiques apparaîtront probablement dans l’hémicycle de Strasbourg.

Selon un projet consulté par L’Observatoire de l’Europe, le groupe PPE de centre-droit – le plus important de l’hémicycle – présentera une motion qui « reconnaît Edmundo González Urrutia comme le président légitime et démocratiquement élu du Venezuela » et exhorte tous les pays de l’UE à faire de même.

La motion « appelle également l’UE et ses États membres à demander un mandat d’arrêt international contre Nicolas Maduro pour crimes contre l’humanité pour toutes les graves violations des droits de l’homme qu’il a commises ».

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